
Comme un hiver indien, 2020-2021
C’est une série de photographies qui s’écrit comme un carnet de bord visuel, un journal intime en dérive, ou encore un album de souvenirs qui aurait traversé un vortex. Chaque image est prise dans le flux du quotidien mais passe, ensuite, sous le filtre d’un troisième œil : celui de Photoshop, bien sûr, mais aussi celui de l’interprétation, de l’hyper-lucidité ou de la dérision douce. Les images deviennent des fragments augmentés d’un réel instable.
À chaque fois, une perturbation : un léger bug du réel, un titre qui frôle le poème ou la punchline. Ce n’est pas tant l’image que son commentaire qui fait glisser la perception, et inversement. L’un trouble l’autre. Comme si le langage grattait à la surface du visible, jusqu’à en fissurer la texture.
Cette série joue avec l’ambiguïté du regard : les images peuvent être drôles, absurdes, tendres ou étrangement mélancoliques. L’ensemble fonctionne comme un carnet de route mental : chaque photographie est un arrêt, chaque annotation un rebond de pensée, une tentative de remettre en jeu ce qu’on croit voir. Les titres réorientent la lecture : ce sont des interférences volontaires, des pistes plus partiales que documentaires, qui déplacent le centre de gravité de l’image.
L’image n’est donc jamais pure. Elle est retouchée, augmentée, déplacée. Elle dialogue, parfois s’oppose à son propre contenu. Il y a conflit entre le sujet photographié et la lecture suggérée, mais dans ce conflit naît un espace possible pour l’autre. Le spectateur est invité à s’y engouffrer, à faire le détour, à reconstruire son propre récit à partir du décalage.
Comme un hiver indien mental, cette série fait serpenter des micro-perturbations visuelles, des poèmes latents, des pensées en suspens. C’est un atlas subjectif d’impressions dissonantes, un exercice de traduction du réel où l’ironie légère côtoie des formes de tendresse, de lucidité et de doute — toujours en tension.
























